CH(s)OSE accorde beaucoup d'importance à ce que vous avez besoin d'exprimer. C'est pourquoi nous vous proposons une rubrique "Témoignages".
Vous pouvez y livrer vos réflexions, vos ressentis, vos joies, vos peines. A la lecture de ces différents textes, vous vous direz peut-être "moi aussi je ressens la même chose". Et c'est bien parce que vous êtes nombreux.ses que CH(s)OSE a choisi de militer pour la légalisation de l'assistance sensuelle et sexuelle et de porter ainsi votre voix ! Tous ces témoignages nourriront notre argumentation auprès des politiques et nous vous en remercions.
Aujourd'hui nous vous partageons le dernier texte que Patricia nous a offert :
CONFESSIONS
"Je ne supporte plus ce corps inerte qui est en totale opposition avec mon esprit qui lui est en mouvement perpétuel.
Il ne cesse de s’agiter, d’avoir des avis sur tout, d’être le porte-parole mais il rencontre toujours sur son chemin ce foutu corps qui lui livre une guerre sans merci. Alors commence un combat sanglant entre ces deux protagonistes, nul ne sait qui sera le vainqueur mais ce qui est sûr c’est qu’après chaque combat, des séquelles irréversibles apparaissent pour chacun d’eux. Le seul moment où ces deux-là sont en paix c’est quand ils se retrouvent sur une scène de théâtre. À ce moment très précis, ils peuvent, à leur aise, s’exprimer librement et sans limites. Ce qui est insoutenable depuis plus de quinze ans ce sont ces nombreux désirs que je ne peux assouvir. Ils sont de tout ordre, mais le plus dur est de faire abstraction totale d’épanouissement amoureux et sexuel. Il est inconcevable pour moi de continuer à vivre de la sorte, c’est une mort lente et terrifiante qui se profile à mes yeux et je n’arrive pas à trouver d’issue de secours. C’est comme si je manquais d’oxygène. Je me retrouve souvent à bout de souffle, cherchant en vain de l’air pur et vivifiant - mais tout ce que je respire c’est un air pollué et asphyxiant. Mon corps, ma peau, mes veines réclament à manger. Peu à peu ils perdent vie et entraînent toutes mes autres entités (esprit, psychisme, cœur, sentiments) vers un gouffre sans fond. Comment pourrais-je m’extraire de cette enveloppe charnelle au moins pendant quelques heures ?
Je n’ai commis aucun crime et pourtant j’en ai pris pour perpette.
Aucune caution, aucun appel, aucune peine purgée ne pourra mettre un terme à cet emprisonnement. Alors, au constat de cette vie si terne, un poison circule dans mes veines. Malgré de nombreux efforts, je ne peux l’empêcher de se répandre dans tout mon être. Ce poison prend plusieurs formes mais les plus importantes restent la colère et l’impuissance. La colère vous brise, la colère vous anéantie, ça brûle à l’intérieur, c’est dévastateur. Des flots de sang voudraient sortir de moi. Quand je m’exprime, j’ai cette sensation de cracher des litres et des litres de sang, ce qui sur le coup libère, mais ce qui est vicieux c’est qu’à peine vidées les vannes se remplissent aussitôt jusqu'à débordement. C’est un cycle sans fin. Souvent, je pense que je ne suis « rien ». Il y a une explication à cela. En fait, pour moi « l’avoir » construit « l’être » or, je considère que mon ou mes « avoirs » sont infimes pour ne pas dire nuls. Alors comment mon « être » pourrait-il se développer normalement ? Il n’est pas assez nourri pour cela, il ne possède pas assez d’éléments pour cela, sa croissance est douloureuse, quasi impossible. J’en arrive à cette conclusion que mon « être » ne peut exister sans son allié : « l’avoir »."
Patricia